Félix-Savard Côté : du ski hors-piste 137 jours par an
Certains passent leur vie à rêver, d’autres vivent leurs rêves. Félix Savard-Côté tombe assurément dans la dernière catégorie. Rencontre avec un gars qui skie au Québec jusqu’à 137 jours par année, et qui aspire à en faire encore plus.
Quand on le regarde aller, Félix Savard-Côté semble vivre dans un monde presque parallèle, un monde où les gens qui ont une passion dévorante pourraient tous se retrouver. Le monde de Félix, lui, s’articule autour du ski. « Le ski, c’est le livre que j'ai envie d'écrire avec ma vie. » Chacune de ses décisions est teintée par cette obsession de toujours gravir, puis dévaler les montagnes : l’endroit où il vit, les emplois qu’il occupe, ce qu’il mange, la voiture qu’il conduit. Tout doit concourir à le rapprocher toujours plus de sa passion. « J'aime la société, c’est juste que j'aime encore plus les montagnes. »
Félix, tu ne viens pas d’une famille de skieurs ou de montagnards, alors d’où tiens-tu ta passion pour le ski?
Quand j’étais petit, je pouvais passer deux heures tout seul, dehors sous la pluie, juste parce que ça me tentait. C’est vraiment dehors que je me sens bien. Mais parce que j’ai toujours voulu vivre près des montagnes, j’ai quitté Drummondville pour déménager en Gaspésie, au début de la vingtaine. Et c’est là que j’ai eu la piqûre.
Comment ça s’est passé?
J’avais 22 ans (j’en ai maintenant 28) lorsque je suis allé aux Vallières*, dans le réserve faunique des Chic-Chocs, pour ma première descente. J’étais avec un ami qui n’avait jamais skié là, mais moi je connaissais bien le coin, sans y avoir jamais dévalé les pentes. Ça a été super difficile... mais ce fut aussi une sorte de révélation. À partir de là, je suis devenu obsédé par le ski et je me suis mis à trouver l’été vraiment long...
*On en profite pour souligner qu’aller aux Vallières pour s’initier au ski n’est pas l’idée du siècle, car c’est un terrain très technique. Mais hey! Vive les gens passionnés!
Qu’est-ce qui fait que tu aimes autant le ski hors-piste?
C’est une combinaison de plein de choses. Pour moi, le bonheur c’est d’être en montagne. J’aime autant monter avec des peaux de phoque que descendre, mais c’est sûr que la descente, c’est le clou de la journée. Ce que j’aime du hors-piste, c’est de me retrouver en nature et d’en faire un peu partie. Je fais même vraiment attention de ne pas écraser des plantes, quand je me promène ou que je skie.
Aimes-tu assez le ski pour t’y adonner en toute circonstance?
C’est lorsque les éléments rebutent une majorité de skieurs que je ressens encore plus l’appel des sommets enneigés. Quand la maison où je vis branle par la force du vent et que je ne vois pas l’autre côté de la rue à cause du blizzard, je suis incapable de ne pas sortir en montagne, même s’il fait nuit ou –40°C, ça me motive encore plus.
Ta passion est assez intense pour que tu aies skié 22 mois consécutifs au Canada. Explique-nous donc ça?
Ben c’est pas compliqué : tu fais juste trouver de la neige et tu la skies! Dans l’Ouest canadien, c’est sûr que c’est plus facile, même durant l’été. Sinon, l’été dernier, je suis resté au Québec, mais j’ai quand même skié jusqu’au mois d’août. En fonction de l’orientation des montagnes, du vent et de l’altitude, il y a toujours des endroits où il reste de la neige, dans le parc de la Gaspésie. Mais ça peut être dangereux.
As-tu déjà eu vraiment peur en montagne?
Mettons que je suis déjà passé très proche de partir avec une avalanche. Mais ce dont j’ai le plus peur, c’est de perdre un ski quand je suis dans un couloir dans lequel je ne pourrais juste rien faire, sauf chuter pendant vraiment longtemps. Je me suis justement blessé au genou récemment (mais rien de grave) parce que j’avais perdu un ski et que je suis tombé dans de la roche; sinon, je m’en sors assez bien pour le nombre de jours que je passe en montagne. Il faut dire que je fais vraiment attention : j’ai suivi des formations en sécurité et pour les avalanches, et je calcule les risques le plus possible. Même dans la vie de tous les jours, je suis prudent pour pouvoir continuer à skier. C’est pour ça que je ne ferai jamais de vélo de montagne : même si je trouve que ça a l’air malade, les gens se font tout le temps mal!
Quelle est ta montagne préférée en Gaspésie?
Le mont Albert! Cette montagne-là a tout ce qu’un skieur hors-piste peut souhaiter, c’est la seule qui est comme ça au Québec. Elle est tranchée et elle a un gros plateau, ce qui fait que beaucoup de neige s’y accumule à chaque hiver. C’est un véritable écosystème que je respecte énormément.
En terminant, quel est ton souhait pour le ski hors-piste en Gaspésie?
Que la pratique du ski demeure hors-piste, qu’on arrête de fabriquer des pistes. Qu’on protège cet environnement totalement unique et qu’on agrandisse même la zone protégée. Pour y arriver, j’aimerais que tout le monde travaille ensemble, pas en silo, et qu’on trouve une manière commune de développer le territoire pour les activités comme le ski, mais toujours en respectant la nature.