Traversée de Charlevoix : entre monts et merveilles
Au cœur de la Réserve mondiale de la Biosphère, la Traversée de Charlevoix déroule ses 105 km de sentiers entre le parc national des Grands-Jardins et celui des Hautes-Gorges-de-la-Rivière-Malbaie. Avec ses forêts, lacs et sommets à perte de vue, ce trek est avant tout une belle aventure humaine dont les premières lignes ont été écrites il y a près de 30 ans.
Il n’est pas fréquent de trouver un bénévole aussi fidèle au poste trois décennies après avoir initié un projet. La Traversée de Charlevoix, c’est l’histoire d’une vie. Le rêve d’un homme : Eudore Fortin. Un rêve devenu réalité à force de labeur, d’obstination et… de sourires. À une époque où l’écotourisme n’avait rien d’une mode, ce fils et petit-fils de montagnards a décidé de mettre en valeur son patrimoine, soit l’arrière-pays de la région de Charlevoix. Il y a développé l’escalade et le ski de fond, puis la randonnée en forêt. Secondé au départ par la Fédération québécoise de la montagne, il défriche et balise tronçon après tronçon, construit quatre refuges en bois ronds et accueille « ses » premiers marcheurs en 1977. La « Traversée » était née.
À 78 printemps, son fondateur reste discret sur les difficultés qu’il a dû traverser au fil des années, préférant évoquer le relatif consensus qui règne aujourd’hui autour de la Traversée de Charlevoix. Mais Jacques Breton, un ancien professeur de philosophie devenu cartographe et « débroussailleur bénévole » (et aussi un guide captivant !) ne tarit pas d’éloges sur les capacités d’Eudore à surmonter les obstacles. Entre les coupes à blanc qui l’obligeront maintes fois à déplacer le tracé, les refuges vandalisés ou occupés illégalement, les rapports de voisinage ne sont pas toujours simples. Paradoxalement, l’adversaire le plus féroce, c’est la nature elle-même qui oblige un entretien constant du sentier, sous peine de le voir disparaître.
Parc national des Grands-Jardins © Shutterstock
La Traversée de Charlevoix n’a pas la renommée (ni la fréquentation) de sentiers comme celui de l’Acropole des Draveurs tout proche. Et elle n’a pas les points de vue sur le Saint-Laurent qu’offre le Sentier des Caps. Alors, pourquoi tant d’acharnement ? Au fil des journées de marche et des nuits en chalets, la réponse est pourtant là, bien évidente. Sans prétention ni artifice, cette marche en forêt nous immerge au cœur de la biosphère, un territoire où la nature et l’homme tentent de cohabiter. On y croise parfois des pylônes électriques aux côtés des pins centenaires. Ailleurs, un bulldozer forestier a transformé le sentier en un morne boulevard de terre et de roches…
S’il faut constamment la surveiller, cette présence humaine parvient malgré tout à faire corps avec le paysage. Ce qui reste au marcheur dans cette immensité verte (ocre ou blanche, selon la saison), c’est le plaisir. Le plaisir de l’ascension de plusieurs sommets avec, au loin, la ligne bleue du Saint-Laurent. Le plaisir d’une immersion dans une végétation arctique-alpine où un porc-épic peut venir vous ouvrir la route. Plaisir des soirées autour du poêle, à philosopher, jouer au poker et repartir le lendemain randonner en groupe d’amis improvisés. Et surtout, le plaisir du silence.
Au terme du parcours, j’étais incroyablement joyeuse et détendue dans la voiture d’Eudore qui me ramenait – à pleine vitesse comme toujours ! – par la Route des Montagnes. Sous mes yeux défilaient une marée de frênes, d’ormes et d’érables ainsi qu’un chapelet de montagnes (dont la légendaire Noyée) toutes reliées d’un trait d’union invisible par un petit sentier défriché avec passion.
> LE MEILLEUR : Pique-niquer au sommet du mont de la Noyée, face à un panorama spectaculaire, et découvrir à nos pieds un lac en forme de cœur plus bas dans la vallée.
> LE PIRE : Être celui (ou celle) qui se relève la nuit pour mettre des bûches dans le poêle parce qu’il (ou elle) a perdu au poker !
> LE PLUS BIZARRE : Tester une ration de l’Armée canadienne (pour changer des plats lyophilisés). À réserver aux mordus de « pochettes-surprises » ! Plutôt particulier…
Encore plus…> Le trek La Traversée de Charlevoix est à la fois un tronçon du Sentier transcanadien et du Sentier national au Québec. De juin à novembre, elle se réalise à pied (7 jours, niveau intermédiaire) ou en vélo de montagne (3 à 4 jours, niveau expert). De mi-décembre à fin mars, vous pourrez la parcourir en ski de fond (7 jours, niveau expert). Les circuits de courtes randonnées uniquement sont ouverts aux raquettes. > Où dormir - Durant la Traversée ; Option rustique : six refuges champêtres dotés d’un poêle à bois peuvent accueillir de 2 à 8 personnes. Option bien-être : six spacieux chalets de construction scandinave logent jusqu’à 15 personnes (matériel de cuisine fourni, cuisson et éclairage au propane, chauffage au bois). La formule « Super de Luxe » vous donne droit à l’acheminement des bagages et de la nourriture, ainsi qu’au transfert du véhicule au point d’arrivée. > Bon à savoir La Traversée de Charlevoix est un organisme privé sans but lucratif dont les ressources proviennent… de vous. Une contribution volontaire (même minime) lors de l'utilisation des sentiers de courtes randonnées contribue à leur pérennité. N’hésitez pas à laisser vos dons aux bureaux de Saint-Urbain au kilomètre 10,6 ou dans les urnes prévues à cet effet. Vous pouvez également soutenir les activités de la Traversée en adhérant au Club des Amis de la Traversée. > Entre amis Vous êtes seul(e) pour cette aventure ? Johanne Leduc se fera un plaisir de relayer votre appel sur le site de la Traversée. > Infos 418 639-2284 • traverseedecharlevoix.qc.ca |